J'ai reculé jusqu'à ce jour les comptes
Mais dans mon dos un riche rit de la mort,
Et moi qui m'insurge comme un Grec
Qu'ai-je donc de commun et d'étranger
Avec ce riche et cette blonde et ces coquins.
Ai-je évité la mort pour trahir la mort
Voir trahir la mort et voir regretter la mort
De Roger Radisson la mort des nôtre et des vôtres
Et regretter de n'être pas mort avec ?
J'ai repoussé jour à jour l'humiliation
Mais à notre frontière toujours des prisons,
Et dans nos frontières toujours des prisons,
Et pour les Juifs des prisons, et pour les pauvres
Des prisons, et deux prisons pour la Pologne,
Et pour la justice la prison, et pour le Christ
Des prisons des églises comme des prisons
Des curés et monseigneur comme geôliers
Et des chrétiens heureux d'être leurs prisonniers.
Es-tu mort pour rien en ce renouvellement
Que nous appelions révolution et désirions ?
Es-tu mort pour peu en ce retournement
Auquel nous appuyions toi et nous nos corps ?
N'es-tu pas mort pour que tombe l'outrage,
S'effondre le mépris, de dispersent les geôliers ?
N'es-tu pas mort, Roger, pour le règne de Justice,
Pour que le soleil se lève sur terre pour un peu
Plus de monde et pour que le pain leur soit quotidien ?
Maintenant que derrière moi je regarde,
J'ai honte et le dirai quitte à me faire pendre
Comme parjure et mauvais conjuré.
Ils voudraient que je sois content et ne suis pas
Content car nos comptes sont truqués,
Et le sang versé n'a pas porté semence
Comme il fut convenu au jour où nous le donnions,
Et tout est à refaire à partir des carnages,
Et la croix n'a pas aboli la croix.
(...)
Robert Morel - Octobre 1947
A
la mémoire, par Robert Morel |
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